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'Nocturnal Animals' de Tom Ford (4/10)

Susan Morrow, une galeriste d’art de Los Angeles, s’ennuie dans l’opulence de son existence, délaissée par son riche mari Hutton. Alors que ce dernier s’absente, encore une fois, en voyage d’affaires, Susan reçoit un colis inattendu : un manuscrit signé de son ex-mari Edward Sheffield dont elle est sans nouvelles depuis des années. Une note l’accompagne, enjoignant la jeune femme à le lire puis à le contacter lors de son passage en ville. Seule dans sa maison vide, elle entame la lecture de l’oeuvre qui lui est dédicacée. Dans ce récit aussi violent que bouleversant, Edwards se met en scène dans le rôle de Tony Hastings, un père de famille aux prises avec un gang de voleurs de voiture ultraviolents, mené par l’imprévisible Ray Marcus. Après lui avoir fait quitter la route, le gang l’abandonne impuissant sur le bas-côté, prenant sa famille en otage. Ce n’est qu’à l’aube qu’il parvient au commissariat le plus proche, où il est pris en charge par le taciturne officier Bobby Andes . Un lien fort va se créer entre les deux hommes, et lier leurs destins dans la poursuite des suspects, coupables d’avoir donné vie au pire des cauchemars de Tony. Susan, émue par la plume de son ex-mari, ne peut s’empêcher de se remémorer les moments les plus intimes qu’ils ont partagés. Elle trouve une analogie entre le récit de fiction de son ex-mari et ses propres choix cachés derrière le vernis glacé de son existence. Au fur et à mesure de la progression du roman, la jeune femme y décèle une forme de vengeance, qui la pousse à réévaluer les décisions qui l’ont amenée à sa situation présente, et réveille une flamme qu’elle croyait perdue à jamais.


Après un très bon ‘A Single Man’ qui malgré ses défauts promettait l’éclosion d’un excellent cinéaste, Tom Ford revient avec ‘Nocturnal Animals’, accompagné d’un casting de premier choix et auréolé d’un Lion d’Argent au Festival de Venise. Dès l’ouverture, le film se réclame de David Lynch et son indétrônable ‘Mulholland Drive’. Ambiance nocturne prenante, musique mystérieuse, le couturier metteur en scène semble parti pour réaliser un thriller nébuleux et original. Tom Ford est un faiseur d’image dans l’âme et cela se voit à l’écran, tant ses cadres et ses ambiances sont léchées. Avec une telle mise en scène, le début décolle sans problème vers quelque chose de prometteur. Enchevêtrant trois narrations à la fois, reliées entre elles par la grande Amy Adams, Tom Ford semble franchir un cap dans ses ambitions. Malheureusement, le constat est sans appel, passée la première demi-heure, le film patine sévèrement. Le film propose des séquences fortes (notamment la scène de l’agression nocturne en voiture) mais maîtrise encore mal sa gestion des espaces et du rythme. Les histoires s’entremêlent mais sont inégales et finalement assez creuses. Tom Ford noie en effet ses intentions dans plusieurs directions si bien qu’on se demande encore ce qu’il a voulu transmettre. Car dans le fond, aucune des trois histoires n’est véritablement originale ou prenante. La trame principale consiste à filmer une actrice qui lit un livre et réagit hystériquement à chaque chapitre. La seconde raconte une enquête cousue de fil blanc et pas vraiment palpitante. La troisième est une série de flash-backs sur une histoire vue et revue au cinéma depuis des lustres. Tom Ford ne précisera jamais véritablement ses intentions entre ses connexions narratives et cela sonne comme un manque d’inspiration tant les idées se dispersent sans être approfondies. Film hybride mal imbriqué, ‘Nocturnal Animals’, malgré sa plastique de rêve, est souvent grossier et tape-à-l’œil, avec des transitions qui manquent de finesse, des jeux d’acteurs qui deviennent exagérément outranciers. Servi par des dialogues parfois au ras des pâquerettes (notamment quand un Jake Gyllenhaal exsangue s’étonne plusieurs fois qu’un meurtrier puisse éprouver du plaisir à tuer !), le film s’enlise véritablement et déçoit sur presque toute la ligne. Se voulant un digne héritier de Lynch et réalisant un film hybride et alambiqué, Tom Ford déçoit malgré ses splendides images. Complètement classique sur le fond et sans finesse, ses trois histoires imbriquées enfoncent des portes ouvertes et ne racontent en définitive rien d’autre qu’une vacuité créatrice décidément beaucoup trop tape-à-l’œil.

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