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'Nocturama' de Bertrand Bonello (4/10)

Paris, un matin. Une poignée de jeunes, de milieux différents. Chacun de leur côté, ils entament un ballet étrange dans les dédales du métro et les rues de la capitale. Ils semblent suivre un plan. Leurs gestes sont précis, presque dangereux. Ils convergent vers un même point, un Grand Magasin, au moment où il ferme ses portes. La nuit commence.


Après un bon biopic sur Yves Saint-Laurent, Bertrand Bonello nous revient dans un film au potentiel hautement subversif : l’histoire d’un groupe de jeunes qui orchestre des attentats dans Paris. Produit avant les attentats qui ont touché la capitale française, le film était donc tristement prémonitoire et potentiellement choquant.

Le résultat est malheureusement assez banal et finalement très plat et répétitif, à mille lieux de ce que l’on pouvait attendre. Si le pari de Bonello de ne pas verser dans le sensationnel ou le choc est louable, il choisit malgré tout une autre solution de facilité : celle de ne jamais expliquer ses personnages et s’impliquer lui-même. En résulte un film froid, pas vraiment dérangeant et qui malheureusement dresse un portrait succinct et un peu ‘à côté de la plaque’ des jeunes d’aujourd’hui.

Si le film multiplie dans sa première partie les intrigues silencieuses en montrant le véritable ballet auquel se livrent ces jeunes afin de préparer leurs méfaits, il ne décollera jamais vraiment. Expédiées en quelques séquences un peu simplistes, les motivations de ces jeunes se résumeront à ‘refuser le système’. Coquilles complètement vides et désincarnées malgré quand même quelques réactions de la part de chaque personnage, ils ne mettront jamais en doute leur entreprise, ils n’hésiteront que rarement, ils tueront sans hésiter ceux qui leur barrent le passage. Leur préparation et leur coordination est digne d’un grand film d’espionnage alors qu’ils ne sont pas entraînés.

Passons sur le côté peu crédible des ‘héros’. Une fois leur méfait accompli, ils se retrouvent coincés dans un grand magasin parisien. Ici, l’intrigue va faire un surplace navrant et montrer pendant une heure ses personnages en train de danser et jouer. C’est un peu léger. Si Bertrand Bonello filme enfin des doutes, de légers remords, il peine à donner corps à leurs sentiments. Ces ados semblent plus préoccupés de faire la fête et de voler les marchandises du magasin plutôt que de revenir sur ce qu’ils ont fait.

En les montrant ainsi si détachés de leurs actes et avides de consommer des produits de luxe, le réalisateur exploite un penchant bien réac concernant la jeunesse : pouvant tuer pour un Iphone, sans sentiments, se rebellant violemment contre l’ordre établi.

Ce postulat sans nuances grève un peu plus son entreprise même si elle installe des paradoxes intéressants.

Tout n’est pas à jeter dans ‘Nocturama’, à commencer par quelques séquences très bien filmées, et des comédiens tous très investis. Mais le film finit par sonner désespérément creux, brouillant son message, évitant les sujets qui fâchent. On se demande si le détachement de Bonello est vraiment une entreprise artistique ou une volonté de ne pas aller trop loin dans le clivage afin de contenter tout le monde.

En définitive, ‘Nocturama’ est un film assez vain et brouillon. Très bien mis en image et interprété, le film passe cependant à côté de ses idées. En voulant filmer une jeunesse désœuvrée, l’œuvre de Bertrand Bonello tape souvent à côté par manque de finesse et de contenu. Décevant.


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