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'Ma Loute' de Bruno Dumont (3/10)

Eté 1910, Baie de la Slack dans le Nord de la France. De mystérieuses disparitions mettent en émoi la région. L'improbable inspecteur Machin et son sagace Malfoy (mal)mènent l'enquête. Ils se retrouvent bien malgré eux, au cœur d'une étrange et dévorante histoire d'amour entre Ma Loute, fils ainé d'une famille de pêcheurs aux mœurs bien particulières et Billie de la famille Van Peteghem, riches bourgeois lillois décadents.


S’inspirant des grandes comédies burlesques et délirantes, Bruno Dumont se veut le digne héritier des maîtres comiques de jadis mais se plante malheureusement malgré les belles promesses que le film laissait espérer.

Le film commence plutôt bien en plantant de manière efficace un décor attrayant et en dépeignant des personnages excentriques à grand potentiel comique. La mise en scène de Bruno Dumont est clairement le point fort de ‘Ma Loute’ qui se sert de ce magnifique paysage du Nord comme d’une source d’inspiration formelle pour ses cadrages.

L’introduction des personnages est bien amenée. Que ce soit à travers les petites gens de la communauté de pêcheurs ou les bourgeois venus en vacances, Bruno Dumont montre le délitement d’une société rongée par les vices, malgré des apparences toujours trompeuses.

Le cinéaste nous parle en effet de cannibalisme, d’inceste, avec un ton léger et burlesque qui crée un décalage intéressant, parfois déstabilisant, mais qu’il n’utilisera jamais à son plein potentiel. De même, il crée une galerie de personnages hauts en couleurs mais à force de creuser dans le même sillon, le cinéaste en appauvrit leur richesse.

Le grand problème de ‘Ma Loute’ est un manque clair d’inspiration. Une fois les dix premières minutes passées, le scénario fait du surplace et ne semble avoir plus rien à dire, laissant l’impression que Bruno Dumont n’utilise la veine comique que comme cache-misère, afin de dynamiser un script qui n’avancera que très peu.

‘Ma Loute’ est en effet émaillé de nombreuses redites ou répétitions. Les gags, pris isolément, sont drôles et bien amenés, mais Bruno Dumont les répète à outrance, déclenchant ainsi un certain ennui et montrant avec évidence son manque flagrant d’inspiration. D’un inspecteur de police idiot et obèse qui dévale les collines en roulant, aux chutes comiques (à longue prévisible) des transats, les mêmes gags sont exploités jusqu’à la fin et instaure ainsi un vide colossal dans l’entreprise comique.

On attendait beaucoup du trio de comédiens professionnels (une grande partie du casting est constituée d’amateurs) mais il déçoit. S’ils montrent pleinement leur potentiel comique, Fabrice Luchini, Juliette Binoche et Valéria Bruni Tedeschi sont en roue libre et livrés à eux-mêmes et ont tendance à en faire des tonnes et franchir plusieurs fois la ligne rouge.

Excessif dans ses effets, dans le jeu de ses comédiens, ‘Ma Loute’ utilise ses débordements pour mieux cacher une pauvreté narrative flagrante, rendant le film long et mal rythmé. Le film de Bruno Dumont, malgré ses belles images, n’a malheureusement pas grand-chose à dire alors qu’il disposait d’un potentiel diablement intéressant. Dommage…


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