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'Krigen (A War)' de Tobias Lindholm (6/10)

Le commandant Claus M. Pedersen et ses hommes sont affectés dans une province d’Afghanistan, tandis qu’au Danemark, sa femme, Maria, tente de faire face au quotidien et d’élever seule leurs trois enfants. Au cours d’une mission de routine, les soldats sont la cible d’une grave attaque. Pour sauver ses hommes, Claus va prendre une décision qui aura de lourdes conséquences pour lui, mais également pour sa famille…


Nouvelle preuve de la vitalité du cinéma danois, ‘Krigen (A War)’ débarque sur les écrans accompagné de sa nomination à l’Oscar du Meilleur Film Etranger. Cinéaste contemporain d’un autre danois bien connu, Nicolas Winding Refn, Tobias Lindholm s’inscrit cependant beaucoup plus dans la tradition du cinéma danois de Thomas Vinterberg ou de Lars Von Trier. Caméra au poing, il filme l’enfer d’une guerre aux multiples facettes et livre un film intéressant bien que bancal. ‘Krigen’ est un film en trois étapes dont les deux premières sont imbriquées : montrant à la fois la guerre en Afghanistan par les yeux d’un homme puis la vie de sa famille restée au Danemark, les deux premiers points semblent vouloir relier la cellule familiale face au drame de la guerre. L’idée est ambitieuse et intéressante et plutôt bien amenée par le scénario. Dépeignant avec efficacité l’enfer de la guerre, le réalisateur maitrise très bien la tension, la mise en espace, et la psychologie de ses personnages, rendant ses images riches et traversées par une foule de thématiques. C’est ce qui fait la force et la faiblesse du film, son aptitude à aborder et effleurer des thèmes qui, faute de temps, ne seront pas vraiment développés. Ici, un dialogue via communication longue-distance entre le père et sa famille montre la fracture entre deux mondes, la femme restée au Danemark ne voulant pas parler d’un quotidien forcément futile par rapport à l’enfer de la guerre, l’homme en Afghanistan restant vague face aux atrocités qu’il voit. Cette idée de fracture sera bien traitée mais survolée, tout comme les autres thèmes, comme celui du manque, de l’entraide, de la violence etc… ‘Krigen’ aurait mérité plus de temps pour se développer et pourtant, il manque malgré tout de rythme et s’impose des longueurs inutiles. En cela, le film reste bancal et on a la sensation d’assister à la naissance de trois films, avec la dernière partie qui se déroule dans un tribunal, qui jamais ne se rencontrent vraiment. Le pari était risqué et à moitié réussi : Krigen souffre de ses allers-retours incessants entre le Danemark et l’Afghanistan et des trop nombreuses pistes de lecture qu’il entre-ouvre à peine. En effet, le héros sera confronté à des choix cornéliens. Il condamnera une famille afghane à cause du protocole militaire qu’il veut respecter à tout prix, et sauvera un des siens en finissant par contourner ce même protocole, enclenchant par là des dégâts collatéraux importants. ‘Krigen’ soulève donc de nombreuses questions sur le choix, sur le coût éthique d’une guerre et la distinction complètement tronquée entre le Bien et le Mal dans ces conflits. Ces questions permettent au film d’impliquer le spectateur dans son processus, mais en laissant ces questions béantes sans les approfondir, il reste assez superficiel dans son traitement. ‘Krigen’ est donc un film intéressant, de bonne facture, mais laisse une sensation d’inachevé. Peut-être trop ambitieux dans son traitement, il semble réunir trois films en un, sans développer chaque facette de la manière adéquate. Malgré tout, le film de Tobias Lindholm soulève des questions vitales et réserve quelques beaux moments de cinéma.

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