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'Youth' de Paolo Sorrentino (10/10)

Fred et Mick, deux vieux amis approchant les quatre-vingts ans, profitent de leurs vacances dans un bel hôtel au pied des Alpes. Fred, compositeur et chef d’orchestre désormais à la retraite, n’a aucune intention de revenir à la carrière musicale qu’il a abandonnée depuis longtemps, tandis que Mick, réalisateur, travaille toujours, s’empressant de terminer le scénario de son dernier film. Les deux amis savent que le temps leur est compté et décident de faire face à leur avenir ensemble. Mais contrairement à eux, personne ne semble se soucier du temps qui passe…


Après ‘La Grande Bellezza’ qui avait raflé il y a quelques années l’Oscar du Meilleur Film Etranger, Paolo Sorrentino revient avec un nouveau film en langue anglaise : ‘Youth’.

Dès les premiers plans, le réalisateur impose à nouveau son talent de faiseur d’images. Car c’est un fait, ‘Youth’ est d’une beauté renversante. Alors que ‘La Grande Bellezza’ était très baroque et tape-à-l’œil (parfois trop), Sorrentino trouve avec ‘Youth’ un rapport à l’image plus subtil et élégant.

Les défauts de son précédent film semblent trouver en ‘Youth’ une certaine résolution. Le scénario de ‘Youth’ est beaucoup plus consistant et Sorrentino compte beaucoup moins sur ses images pour faire oublier la vacuité parfois flagrante de ses films. Beaucoup plus humain, plus riche et moins hermétique, ‘Youth’ semble s’ouvrir à un public plus large et c’est une bonne nouvelle car il abandonne (presque) son extravagance pour aborder de réelles réflexions sur la vie.

Le film doit beaucoup à l’interprétation magistrale de Michael Kaine et Harvey Keitel. Les deux comédiens, au sommet de leur art, parviennent en peu de dialogues à humaniser leurs personnages et à les rendre touchants.

‘Youth’ est peut-être le film le plus sensible de Sorrentino. Car il parle du temps qui passe, des choses que l’on perd avec l’âge, mais aussi de la sagesse que l’on finit par trouver, le réalisateur explore les questions de ces deux octogénaires avec une grâce infinie.

Il y a du grotesque dans ‘Youth’ : un faux Hitler, des plans appuyés sur des corps déformés par l’âge ou par les kilos… Mais Sorrentino trouve de la grâce dans toute chose et fait ressortir l’humanité de chaque personnage présent à l’écran.

‘Youth’ paraît n’aller nulle part, sans réelle structure narrative, mais aborde pourtant une foule de questionnements et de pistes de réflexion. On peut passer à côté de bon nombre d’entre eux car certains seront simplement évoqués par une attitude, d’autres par une musique, alors que d’autres seront amenés de manière beaucoup plus visuelle. Il faut savoir se perdre dans ce magnifique film, comme dans les souvenirs d’une vie humaine.

Frisant parfois le ridicule sans jamais y tomber, Sorrentino effleure toujours le grotesque en montrant la beauté inhérente à toute chose, et affiche une poésie de tous les instants grâce à des scènes parfois surréalistes mais toujours touchantes. Le réalisateur montre à quel point les apparences sont trompeuses, illusoires, et comme le temps leur enlève toute beauté.

Poème philosophique doux et amer, ‘Youth’ est une très belle réflexion sur l’art, sur la vieillesse et sur la vie. Toujours élégant, le film est parcouru par de magnifiques visions, rappelant par-là l’appartenance stylistique de Sorrentino à ses vieux maîtres italiens.

Moins pompeux et plus riche que ‘La Grande Bellezza’, ‘Youth’ est un film magnifique et émouvant. Se rapprochant de plus en plus de son public, le réalisateur italien accouche de l’un des plus beaux films de cette année, dans lequel il faut savoir se perdre et se laisser aller.

‘Youth’ est une merveilleuse réussite.


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