'Le Tout Nouveau Testament' de Jaco van Dormael (7/10)
Dieu existe. Il habite à Bruxelles. Il est odieux avec sa femme et sa fille. On a beaucoup parlé de son fils, mais très peu de sa fille. Sa fille c’est moi. Je m’appelle Ea et j’ai dix ans. Pour me venger j’ai balancé par SMS les dates de décès de tout le monde…
Après un ‘Mr Nobody’ ambitieux mais pas toujours maîtrisé, le rare Jaco van Dormael nous revient avec une production alléchante et une brochette d’acteurs qui promet beaucoup.
‘Le Tout Nouveau Testament’ entend réécrire la ‘mythologie chrétienne’ dans une comédie que l’on sait par avance irrévérencieuse et un peu provocatrice et force est de constater que le réalisateur a parfaitement réussi son coup.
Foisonnant d’idées et de trouvailles scénaristiques et visuelles, ‘Le Tout Nouveau Testament’ se dresse fièrement en digne successeur de ‘Amélie Poulain’ mais sans la saveur parisienne que Jean-Pierre Jeunet insufflait à son film. Van Dormael réalise un film profondément ancré dans la culture belge : à la fois léger, surréaliste, grave aussi, ‘Le Tout Nouveau Testament’ est un film attachant car très humain. Le réalisateur, tel un Dieu miséricordieux, observe ses personnages, bons ou mauvais, avec un œil tendre et complice et fait ressortir leur humanité avec finesse.
Si le film se résume finalement à une histoire assez simple, Van Dormael l’enrichit intelligemment avec des vignettes croustillantes et pétillantes qui en font une œuvre beaucoup plus ambitieuse qu’il n’y paraît.
Loin d’être un pamphlet anticlérical pur et dur (Dieu est le ‘méchant’ de l’histoire), le film veut avant tout revenir à l’échelle humaine et à des valeurs finalement assez chrétiennes, ce qui dénote beaucoup de finesse et de complexité dans le propos.
Toujours inventif, le film fait sourire, choque parfois, et Van Dormael assume les grands écarts émotionnels provoqués au spectateur avec un aplomb incroyable.
Riche, le film l’est assurément en abordant avec sérieux et légèreté beaucoup de thématiques sans pour autant se perdre dans toutes les directions, soutenu par des comédiens excellents, des plus expérimentés aux plus jeunes.
On sent un plaisir communicatif à faire du cinéma, à casser l’image de la mythique Deneuve, à tordre la bonne morale sans méchanceté.
Dès lors, il est dommage de constater que ce bouillonnement d’idées et de thématiques se ralentit un peu au dernier tiers du film. L’histoire se résumant pour l’essentiel à la découverte de six apôtres, le scénario devient assez vite répétitif, passant d’un personnage à l’autre, malgré les efforts louables du réalisateur pour instiller de la nouveauté, grâce à ces encarts humoristiques qui cassent un peu le fil conducteur du récit.
Par conséquent, le film perd un peu de sa force sur la durée. Se terminant dans un kitsch assumé mais visuellement très laid, ‘Le Tout Nouveau Testament’ passe un peu vite à la trappe ses idées de départ et bâcle son épilogue.
Qu’importe, le plaisir est bel et bien là et le film, même s’il est loin d’être parfait, est un très beau concentré du savoir-faire de son réalisateur.