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'Trois Souvenirs de ma Jeunesse' d'Arnaud Desplechin (9/10)

  • Photo du rédacteur: Sylvain Ruffier
    Sylvain Ruffier
  • 22 mai 2015
  • 2 min de lecture

Paul Dédalus va quitter le Tadjikistan. Il se souvient… De son enfance à Roubaix… Des crises de folie de sa mère… Du lien qui l’unissait à son frère Ivan, enfant pieux et violent…Il se souvient… De ses seize ans… De son père, veuf inconsolable… De ce voyage en URSS où une mission clandestine l’avait conduit à offrir sa propre identité à un jeune homme russe… Il se souvient de ses dix-neuf ans, de sa sœur Delphine, de son cousin Bob, des soirées d’alors avec Pénélope, Mehdi et Kovalki, l’ami qui devait le trahir… De ses études à Paris, de sa rencontre avec le docteur Behanzin, de sa vocation naissante pour l’anthropologie… Et surtout, Paul se souvient d’Esther. Elle fut le cœur de sa vie. Doucement, « un cœur fanatique ».


Après un « Jimmy P. » en demi-teinte, Arnaud Desplechin revient avec un film qui aurait mérité les honneurs de la sélection officielle du Festival de Cannes. En effet, « 3 souvenirs de mon enfance » est un excellent film. Constamment inventif et sensible, le réalisateur insuffle une ampleur et une ambition artistique qui manque encore trop souvent dans les productions hexagonales.

Retraçant trois moments clés, ainsi que le présent, de son personnage principal, Desplechin convie le spectateur à une plongée dans les souvenirs. Tour à tour film nostalgique, film d’espionnage, film générationnel, film d’amour, ‘3 souvenirs de ma jeunesse’ brasse énormément de thématiques, soutenu par une réalisation toujours inventive et originale. Là où d’autres seraient partis dans toutes les directions en faisant un film brouillon, Desplechin parvient miraculeusement à garder le cap d’une histoire toujours intéressante et bien menée de bout en bout.

Le film convoque énormément de matière, de références littéraires, musicales et cinématographiques, mais ne tombe jamais dans le ‘film intello’, grâce à la finesse et au raffinement du réalisateur. Les personnages esquissés sont exquis, mention spécial au jeune Paul, admirablement incarné par le jeune Quentin Dolmaire.

De manière générale, doté d’un excellent casting, le film montre des scènes de vie admirablement mises en image. Desplechin capture avec aisance le sentiment amoureux, les douleurs, les joies de la vie de son héros et parvient à saisir l’essence même de la nostalgie.

En rendant son héros sympathique et singulier, le réalisateur nous projette à l’intérieur de ses expériences, ces instants de vie presque universels dans lequel chacun peut se retrouver, faisant de son odyssée un miroir pour le spectateur.

Variant constamment ses ambiances, Desplechin garde cependant une admirable unité, malgré les savoureuses excentricités de sa réalisation et de son scénario, si bien que l’on ne s’ennuie presque jamais, si ce n’est parfois quelques longueurs pas vraiment dérangeantes.

‘3 souvenirs de ma jeunesse’ est donc bien singulier, alternant le film d’espionnage lors d’une virée à Minsk ou les lectures épistolaires face à la caméra, ou encore ces dialogues surécrits assez spéciaux mais finalement savoureux. Tout semble à sa place et Desplechin utilise ses outils avec une formidable assurance.

Inventif, profond, riche et varié, ‘3 souvenirs de ma jeunesse’ est un magnifique moment de tendresse, de nostalgie et de légèreté. En deux heures, Desplechin parvient à parler du temps qui passe, de l’amour, des liens familiaux, de l’amitié et beaucoup d’autres choses encore sans survoler aucun de ses sujets. Admirable et précieux.


 
 
 
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