'Les Nouveaux Sauvages' de Damiàn Szifron (7/10)
L'inégalité, l'injustice et l'exigence auxquelles nous expose le monde où l'on vit provoquent du stress et des dépressions chez beaucoup de gens. Certains craquent. Les Nouveaux sauvages est un film sur eux. Vulnérables face à une réalité qui soudain change et devient imprévisible, les héros des Nouveaux sauvages franchissent l'étroite frontière qui sépare la civilisation de la barbarie. Une trahison amour, le retour d'un passé refoulé, la violence enfermée dans un détail quotidien, sont autant de prétextes qui les entraînent dans un vertige où ils perdent les pédales et éprouve l'indéniable plaisir du pétage de plombs
Reprenant le principe du film à sketchs, ‘Les Nouveaux Sauvages’ a pour fil conducteur le pétage de câbles de ses protagonistes.
Le réalisateur Damiàn Szifron semble avoir pris un malin plaisir à tourner ces six courts-métrages et si l’on peut regretter qu’il n’y ait pas plus de connexions entre les séquences, l’ensemble propose malgré tout une continuité et une unité bienvenues.
Les sketches sont tous suffisamment différents pour éviter les redites et proposent des variations intéressantes sur son thème central. ‘Les Nouveaux Sauvages’ est en plus très drôle et la diversité des situations permet d’aborder aussi plusieurs types d’humour, du potache en passant par l’humour noir.
Le film est tout sauf un long fleuve tranquille et bien que nous soyons dans une comédie, il n’est pas rare d’éprouver du dégoût ou de la peur, comme dans un bon film de suspens. C’est la force de ce film que de proposer une palette très variée d’émotions et donc de situations. Du ‘duel routier’ directement inspiré du premier film de Spielberg à ‘Bombita’, l’humour n’empêche pas une mise sous pression du spectateur qui grâce à une mise en scène inventive et toujours novatrice, permet une immersion totale dans ces courts-métrages.
Certains sont de purs morceaux de comédie, d’autres sont surtout là pour dénoncer les travers de la société : ‘Les Nouveaux Sauvages’ est très riche en thématiques secondaires sans pour autant s’éparpiller dans toutes les directions.
Damiàn Szifron maîtrise parfaitement l’image. Ses cadrages ainsi que sa mise en espace sont toujours clairs et intéressants. Sûr de ses effets, il n’hésite pas à nous faire rire de situations horribles et questionne ainsi habilement le spectateur sur son rapport à la comédie.
‘Les Nouveaux Sauvages’ est donc un film très bien conçu et maîtrisé et apporte une énergie et une folie communicatives.
Dès lors, il est dommage de constater que comme dans beaucoup de films à sketchs, certaines séquences sont en dessous des autres. Ainsi, les deux avant-derniers courts métrages sont plutôt mineurs, beaucoup moins inspirés et drôles, et ils ralentissent le rythme du film.
Malgré quelques défauts mineurs, ‘Les Nouveaux Sauvages’ est donc un très bon plaisir coupable de cinéma. Inventif, drôle, souvent immoral, Damiàn Szifron ose beaucoup et propose un cocktail explosif d’énergie et d’émotion. A découvrir.