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'Timbuktu' d'Abderrahmane Sissako (9/10)

  • Photo du rédacteur: Sylvain Ruffier
    Sylvain Ruffier
  • 26 déc. 2014
  • 2 min de lecture

Non loin de Tombouctou tombée sous le joug des extrémistes religieux, Kidane mène une vie simple et paisible dans les dunes, entouré de sa femme Satima, sa fille Toya et de Issan, son petit berger âgé de 12 ans. En ville, les habitants subissent, impuissants, le régime de terreur des djihadistes qui ont pris en otage leur foi. Fini la musique et les rires, les cigarettes et même le football… Les femmes sont devenues des ombres qui tentent de résister avec dignité. Des tribunaux improvisés rendent chaque jour leurs sentences absurdes et tragiques. Kidane et les siens semblent un temps épargnés par le chaos de Tombouctou. Mais leur destin bascule le jour où Kidane tue accidentellement Amadou le pêcheur qui s'en est pris à GPS, sa vache préférée. Il doit alors faire face aux nouvelles lois de ces occupants venus d’ailleurs…


A la lecture du synopsis, on aurait pu croire que ‘Timbuktu’ était un film choc sur l’extrémisme religieux. Au visionnage, on se rend compte qu’il n’en est rien et c’est peut-être le premier tour de force de ce film exceptionnel.

Loin de tout manichéisme, Abderrahmane Sissako montre le quotidien d’une ville sous l’emprise des djihadistes. Suivant certains personnages de cette ‘police religieuse’, le réalisateur révèle des hommes avant tout, parfois compatissants, souvent ignorants ou barbares. Cette approche est d’autant plus efficace qu’elle soulève encore plus de questionnements : Comment ces hommes si normaux peuvent en un instant se tourner vers les actes les plus barbares ?

Eclatant son récit en plusieurs séquences habilement connectées entre elles, le réalisateur montre l’état du monde dans ce coin reculé d’Afrique, où les hommes et les femmes se soumettent ou résistent.

Ambitieux dans la forme, ‘Timbuktu’ l’est encore plus dans sa réalisation et sa direction artistique. Abderrahmane Sissako livre un véritable poème, empreint d’une sensibilité et d’une poésie magnifiques. Les scènes sont belles et touchantes, à l’image de ce match de foot sans ballon, car interdit par le régime, ou la fuite d’un assassin traversant une rivière au soleil couchant.

‘Timbuktu’ ne cherche pas à choquer mais à dénoncer de la plus habile manière qui soit. Fort en symboles, le film s’attache à ses personnages sans jamais les juger, et compte sur l’intelligence du spectateur pour le faire s’insurger.

La construction du scénario, tel un film choral, est primordiale et montre de la meilleure manière l’emprise tentaculaire de cette ‘police islamiste’ à Tombouctou. La leçon de vie d’Abderrahmane Sissako est subtile et poétique, à l’image de cette femme folle, qui fait de sa folie une force et qui seule brave tous les interdits religieux et les forces en présence.

Il y a une véritable force et une volonté de fer qui se dégagent des images et des acteurs, à peine troublée par des séquences parfois un peu longues, et qui donnent à ‘Timbuktu’ sa véritable ampleur.

‘Timbuktu’ n’est pas la charge attendue mais une ode à la vie toute en subtilité et un magnifique chant d’insurrection contre l’extrémisme. Véritable œuvre cinématographique, parfois un peu longue, le film d’Abderrahmane Sissako est un très grand moment de cinéma. A voir absolument.


 
 
 
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